Articles taggés avec ‘commandant’

Roussenq l’homme de lettres


samedi 14 octobre 2023 par JMD

21 octobre 1909 Je ne suis pas anarchiste

17 septembre 1910 Mémoires kadéïscopiques

30 septembre 1911 Mettre en pratique les opinions de tout un parti

19 octobre 1911 Connaître la LOI

22 novembre 1911 Petits arrangements entre gardiens et gardés

10 août 1912 Une encre particulière

6 janvier 1913 Le scorbut, le médecin et la mort

1er mars 1917 Écrire et réclamer

6 mai 1917 Une cacophonie douce dans l’harmonie d’un duo sanguinaire

24 juin 1920 Aimer sa souffrance

17 juillet 1921 Agression assermentée

6 mars 1923 Commandant de mes couilles

18 mai 1923 J’ai dicté la lettre de Dain

8 mai 1926 Surveillant alcoolique

19 août 1928 Comité de soutien

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Le Visage du Bagne : chapitre 10 Le Système D.


mardi 26 septembre 2023 par JMD

Au Bagne, la « débrouille » est un qualificatif qui englobe toutes sortes de moyens et de procédés destinés à se procurer de l’argent ou toute autre chose ayant de la valeur. Selon les cas, elle est peut aussi bien être licite qu’illicite.

La « camelote » se rapporte spécialement aux trafics entre surveillants et condamnés ; elle est toujours répréhensible en regard des règlements[1].

Se débrouiller, est la grande affaire en ces lieux où chacun est tenu de pourvoir à son nécessaire, s’il ne veut pas vivre en parasite aux dépens de la communauté.

Les vivres des condamnés, qui constituent leur ration réglementaire – qui devait être sacrée – donnent lieu à une foule de trafics qui se sont révélés à l’épreuve de toutes les défenses et de toutes les précautions préventives[2].

Ils sont entrés dans les mœurs.

D’abord, les employés de cambuse commencent par fausser les pesées ; ensuite les cuisiniers font des prélèvements sur toutes choses : viande, légumes secs, riz, graisse, lard, sucre et café.

Ces détournements sont liquidés aussi bien aux surveillants qu’aux condamnés.

Parmi ces derniers, il y a une catégorie de privilégiés, qui achètent ainsi la ration de leurs camarades – ceux qui savent s’imposer. Au nez et à la barque[3] de ceux qu’ils frustrent ainsi, ils font cuire de beaux biftecks qu’ils acquièrent à bon compte. Les condamnés vendent généralement une partie de ce qu’ils reçoivent de l’Administration : chemises, chaussures, couvertures, savon – dont les surveillants, aux Iles du Salut, et les indigènes à la grande terre, sont acquéreurs. Tous ceux qui ont des emplois en tirent tout ce qui est possible pour améliorer leur sort.

Les boulangers vendent du pain frais, des gâteaux, de la farine (transformée en nouilles) ; les jardiniers tirent parti des légumes verts et des fruits ; les infirmiers trafiquent des boîtes de lait et des médicaments ; les balayeurs extérieurs se livrent aux maraudages. Les comptables sont experts à faire flèche de tout bois. Ils procurent des places et des emplois, tarifés selon leur rendement. Ils font disparaître les libellés de punition, grattent les livrets individuels en faisant disparaitre les notes qui peuvent porter préjudice aux intéressés. Lorsqu’il est formé un convoi pour aller au chantier forestier – ce qui est particulièrement redouté – ils font en sorte de rayer certains noms de la liste pour la remplacer par d’autres. Ces derniers, partiront au lieu et place de ceux qui auront payé pour ne pas partir.

Les plantons, se débrouillent en bazardant du papier, des plumes, de l’encre. Les canotiers écoulent les articles du Bagne, les marchandises volées ; ils passent des billets et des commissions d’une ile à une autre.

De temps en temps, il se commet quelque vol ; il manque une ou plusieurs têtes de volailles ; des régimes de bananes disparaissent. Quant aux cocos, c’est une véritable dévastation.

Certains ont la spécialité de trouver des écoulements pour le produit de ces vols et de ces chapardages.

Tout cela se pratique presque ouvertement, dans la généralité des cas. L’Administration laisse faire : d’ailleurs les surveillants y sont trop intéressés pour faire montre d’un zèle intempestif. Les uns et les autres se tiennent par le bout du nez.

Quelquefois, cependant, des Commandants de pénitenciers ont tenté – tout au moins – d’enrayer le trafic des cuisines.

Ils firent cadenasser les marmites ; les vivres étaient pesées par le Chef de camp, la graisse était mise en sa présence, ainsi que le café et le sucre.

Précautions inutiles ! Les cadenas étaient ouverts et refermés à l’aide de fausses clés ; la graisse était récupérée à la surface. On enlevait une partie du café et on ajoutait de l’eau. De même pour la viande. Le café ainsi détourné, se vendait liquide ; La viande cuite récupérée, était cédée à des commerçants des cases, qui en faisaient des boulettes frites, en y ajoutant de la mie de pain.

Un génie inventif de mauvais aloi, venait à bout de tous les obstacles. Certains allèrent même jusqu’à enduire des briques d’une légère couche de savon pétri et séché, pour les vendre aux cargos de passage.


[1] Note de Roussenq : Exemple : les surveillants et les fonctionnaires se font faire des meubles en « camelote » par les ouvriers de l’atelier des travaux – ainsi que des ustensiles de toutes sortes. Il y a là, à la fois, détournement de la main-d’œuvre pénale et de matières premières appartenant à l’Etat.

[2] Le trafic alimentaire est un des thèmes majeurs de la correspondance de Roussenq qui n’a de cesse de dénoncer cette pratique tout au long de sa détention ; ainsi en est-il dans son Mémoire kaléidoscopique de vingt mois aux îles du Salut qu’il adresse au gouverneur de la Guyane le 19 septembre 1910 et qui pointe du doigt les bagnards infirmiers, cuisiniers et autres « aristocrates du bagne » s’engraissant sur le dos de leur codétenus.

[3] Comprendre plutôt : au nez et à la barbe.

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Le Visage du Bagne : chapitre 7 Sous le casque blanc


samedi 23 septembre 2023 par JMD

Tout surveillant-militaire nouvellement arrivé en Guyane, et je suppose qu’il est célibataire, est loin d’être cousu d’or. Généralement, toute sa fortune se trouve dans une mallette et une ou deux valises. Quelquefois même, une seule valise constitue tout son bagage.

Il n’est ni plus mauvais ni meilleur que le commun des mortels ; c’est un homme comme beaucoup d’autres, ayant ses défauts et ses qualités.

De même que le forçat finit par s’identifier avec le Bagne, qui le façonne de son moule, ainsi l’apprenti-surveillant finira par devenir un garde-chiourme consommé.

De prime abord, le mécanisme du Bagne, ses extraordinaires particularités, ne manquent pas que de l’effarer ; il se demande où il a mis ses pieds. Peu à peu, cependant, il fera corps avec cet ensemble dont il ne pourra plus se dissocier.

Car le Bagne ne déteint pas moins sur les surveillants que sur les condamnés. Comment pourrait-il en être autrement ?

Les surveillants-militaires n’ont jamais reçu une solde suffisante pour leurs besoins, même étant célibataires. À plus forte raison s’ils sont mariés et chargées de famille.

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Le Visage du Bagne : chapitre 4 Organisation et Structure du Bagne


mercredi 20 septembre 2023 par JMD

Le Second Empire ayant aboli les bagnes maritimes – qui se trouvaient dans les ports de guerre – institua, par la loi de 1854, le Bagne colonial de la Guyane où devaient être transportés les condamnés aux travaux forcés. En style administratif, l’ensemble des condamnés en cours de peine fut dénommé Transportation, et chacun des condamnés en particulier, reçut l’appellation de transporté.

La loi de 1854 marqua une étape considérable vers l’humanisation des traitements répressifs.

L’abolition de la marque infâmante, imprimée au fer rouge sur l’épaule de chaque forçat, celles du boulet aux pieds et de l’accouplement obligatoire – qui faisait des forçats ainsi que des frères siamois – furent des innovations capitales.

L’appellation de transporté, elle-même remplaçant celle de forçats, indique un souci de respect humain. L’exposé des motifs de cette loi, n’est pas dénué de sentiments élevés.

Il n’envisage pas la répression comme une fin, mais comme un exemple ; il voudrait que le châtiment soit générateur d’amendement et de relèvement. Malheureusement les faits ont démenti ces théoriques aspirations.

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Le Visage du Bagne : chapitre 3 Aux Iles du Salut


mardi 19 septembre 2023 par JMD

La « Loire » s’annonça, par trois fois, en mugissements prolongés ; peu après, elle mouillait ses ancres, après une traversée de quatorze jours[1].

C’était le 13 janvier 1909.

Dans la rade, et en notre honneur, il y avait deux vapeurs côtiers de la Compagnie de navigation guyanaise, toute une flottille de chalands, de canots et de baleinières.

Cette flottille évolua afin d’opérer le débarquement, sous l’impulsion de vigoureux canotiers – forçats qui maniaient les avirons avec une maîtrise consommée. Ces opérations se firent avec lenteur. Une partie du convoi, les relégués, fût transbordée sur les vapeurs plus haut mentionnés, à destination de Saint-Jean-du-Maroni. Les forçats furent dirigés à bord des chalands sur l’ile Saint-Joseph. Nous fûmes placés en files le long d’une route longeant la mer, on nous compta et on nous recompta après des appels successifs.

Ensuite on nous fit ouvrir nos sacs et en étaler le contenu à nos pieds. De nombreux surveillants, casqués et vêtus de kaki, s’empressèrent d’établir un inventaire qui devait réduire singulièrement notre paquetage.

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Mes tombeaux 15


mercredi 13 juillet 2022 par JMD

Les Allobroges

7ème année, n° 1288,

samedi 14 – dimanche 15 février 1948, p. 2.

Mes tombeaux

souvenirs du bagne

par Paul Roussenq, L’Inco d’Albert Londres

XIV

Une tombe étroite et sombre tel était le cachot où nous conduisait la moindre peccadille

DANS LA NUIT DES CACHOTS

La commission disciplinaire, dans chaque pénitencier, se réunissait une fois par semaine. Elle entendait les délinquants traduite devant elle, pour toutes infractions commises.

Le commandant du pénitencier la présidait, flanqué de deux assesseurs, fonctionnaires placés sous ses ordres.

La prison de nuit était rarement infligée ; la punition cellule pouvait aller jusqu’à soixante jours, celle de cachot jusqu’à trente jours. Mais chaque libellé de punition étant sanctionné indépendamment des autres, il en résultait qu’en réalité la possibilité répressive était illimitée.

Pour ma part, trois cents jours de cachot me furent infligés dans une seule séance, comme sanction de dix motifs différents, à raison de trente jours pour chaque motif. Lire le reste de cet article »

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