Vols à Abbeville


AbbevilleDe la vaisselle, des bijoux, des objets du culte et des coffres forts … dont un n’a pu être éventré. Si la fortune ne sourit pas toujours aux malfaiteurs, ce ne sont tout de même pas ici des malheureux à qui Jacob et ses compagnons ont rendu visite. Abbeville doit cependant posséder un charme certain pour les accueillir cinq fois en à peine un an. A environ 200 km de Paris, la capitale historique du comté de Ponthieu constituerait finalement un espace de travail ordinaire, regorgeant de belle demeures bourgeoises, si elle n’était le point de départ du « Waterloo » de l’illégaliste arrêté à Airaines le 22 avril 1903. Le vol Tilloloy qui précède le « drame de Pont Rémy », et donc le démantèlement des Travailleurs de la Nuit, n’est pourtant pas le plus intéressant des cinq vols commis dans la Porte de la Baie de Somme dont l’examen par la cour d’assises d’Amiens occupe 3 audiences en 1905 : le 10 mars pour les vols Ferry et Meurdesoif, le 11 mars pour le vol de La Rivière et le cambriolage de l’église Saint Jacques, le 14 mars enfin pour le vol Tilloloy.

Ainsi pouvons-nous entrevoir le mode opératoire et l’organisation des « bandits d’Abbeville » à l’écoute des témoins et des questions posées par le tribunal ; les révélations de Gabrielle Damiens, la compagne délatrice de Ferrand, paraissent de fait déterminantes pour accuser Jacques Sautarel, Siméon Charles, ou encore François Chalus. Mais le débat judiciaire, révèle aussi l’aspect technique et politique des forfaits commis. Bour ne peut s’empêcher de faire du prosélytisme en attendant Jacob et Pélissard en gare d’Abbeville ; pour le vol de La Rivière, les voleurs s’étaient retirés par la porte d’entrée et avaient fermé cette porte en tirant de l’extérieur à l’aide d’une ficelle le verrou intérieur. L’auditoire retient son souffle, atterré par l’audace et l’intrépidité des anarchistes mais l’on rit néanmoins aux bons mots de Jacob ou du président Wehekind  ou bien lorsque Ferrand affirme n’avoir pu sortir de la riche demeure de M. Ferry à cause des ébats d’un couple sur un banc public.

Audience du 8 mars 1905

Voici l’analyse aussi complète que possible de l’acte d’accusation, qui débute par la relation du drame de Pont-Rémy.

Le drame de Pont-Rémy

Dans la nuit du 21 au 22 avril 1905, vers 1 heure du matin, Mme Leleu, femme de M. Leleu, cafetier, place Saint-Pierre à Abbeville, apercevait de la fenêtre de sa chambre trois individus qui s’introduisaient à l’aide d’escalade et d’effraction dans la maison alors inhabitée de Mme veuve Tilloloy. Elle prévenait son mari, qui alla immédiatement avertir la police.

Mais la sortie de M. Leleu avait été remarquée des malfaiteurs, qui prirent aussitôt la fuite.

Les premières constatations permirent d’établir qu’après avoir vainement tenté d’ouvrir, à l’aide de pesées, la porte cochère de la maison de Mme Tilloloy les voleurs avaient pénétré à l’intérieur en fracturant une persienne du rez-de-chaussée et en faisant jouer l’espagnolette d’une fenêtre dont ils avaient cassé un carreau. Dérangés dans leurs recherches, ils n’avaient eu le temps de s’emparer que d’un service à salade en ivoire et argent, d’un manche à gigot, d’une pince à sucre et d’un parapluie.

Informés que trois individus avaient été vus se dirigeant vers Pont-Rémy, le brigadier de police Auquier, en tenue, et l’agent Léonard Pruvost, en tenue bourgeoise, prenaient le premier train du matin pour cette localité. Ils pensaient qu’ils verraient, à la gare de Pont-Rémy, les cambrioleurs monter dans ce train qui se dirigeait sur Paris.

Audience du 10 mars 1905

Vol Ferry à Abbeville

Le 24 avril 1902, vers 6 heures du soir, la bonne de M.Maquigny, demeurant à Abbeville, se rendait au domicile de M. Ferry, beau-père de son patron qui, depuis quelques jours, était absent. Elle constata qu’un vol avec effraction avait été commis chez ce dernier.

La porte d’entrée avait été ouverte à l’aide de pesées. Au rez-de-chaussée une armoire bibliothèque, un bureau et une étagère avaient été vidés, tous les objets jetés sur le sol. Le buffet de la salle à manger était ouvert ; sur la cheminée se trouvait une bouteille de kirsch. Dans la chambre à coucher, un secrétaire avait été fouillé de fond en comble. Dans un cabinet une armoire avait été fracturée. Des épingles de cravate en or, une timbale, une cuiller à sirop, un couvert en argent, un fume-cigarette, une montre en or, une vieille broche, un collier, le tout d’une valeur de 365 francs, avaient été dérobés.

Ferrand, qui se reconnaît l’un des auteurs de ce vol, raconte que sa sortie avait été gênée par deux amoureux assis sur un banc en face. Le fait a été reconnu exact. Ce vol avait été commis par Ferrand et Vambelle au cours d’une tournée entreprise par eux. M. Ferry, à la barre des témoins, déclare ne pouvoir donner aucun détail sur le vol. Il peut seulement faire connaître les objets qui lui ont été soustraits. Il donne l’énumération de ceux-ci. Il estime à 400 francs le préjudice qui lui a été causé.

Le président interroge Ferrand.

–        Vous reconnaissez le vol ?

–        Oui, monsieur.

–        Vous avez été dérangé au moment de votre sortie.

–        Oui, monsieur le président, par deux amoureux qui se trouvaient sur un banc.

la bande d\'Abbeville dans l\'Illustration du 18 mars 1905Audience du 10 mars 1905

Vol Meurdesoif à Abbeville

Profitant de l’absence de M. Meurdesoif qui s’était rendu à Berck et avait laissé sa maison la nuit du 11 au 12 juin 1902, les malfaiteurs pénétrèrent chez lui. Ils avaient fracturé la porte de la cave. Les portes intérieures avaient été fracturées ainsi que les meubles fermés à clef.

Un coffre-fort avait été couché à terre et on avait tenté, sans pouvoir y parvenir, de l’ouvrir.

D’après M. Meurdesoif, les auteurs de ce vol avaient dû se retirer sans rien emporter, car il n’avait laissé aucune valeur ou objet précieux chez lui. Plus tard, Mme Meurdesoif crut reconnaître des boucles d’oreilles qu’on lui représentait mais elle ne fut pas affirmative. Ferrand s’est reconnu l’auteur de vol.

Un incident a permis d’établir qu’il était accompagné de Chalus. Dans la journée, ils s’étaient rendus tous deux dans une maison de tolérance d’Abbeville où Chalus se fit passer pour un Anglais et où il eut une discussion avec une femme. Le personnel de cette maison se rappelle l’incident, et une fille Blond Maria, confrontée avec Chalus, l’a formellement reconnu.

Mme Meurdesoif dépose. Elle croit qu’on ne lui a rien pris. On veut lui montrer un débris de boucle d’oreilles, mais on ne la retrouve pas.

–        Ferrand, vous reconnaissez les faits ?

–        Oui.

–        Vous n’avez pu ouvrir le coffre-fort ?

–        Non, monsieur, il nous manquait le « tube ».

(Le tube est un manche de levier.)

–        Vous étiez armé dans vos expéditions ?

–        Quelquefois, pas toujours.

–        Vous étiez armé pour le vol Meurdesoif ?

–        Je ne me rappelle pas.

M. le président interroge Chalus. Il rappelle qu’il a été plusieurs fois condamné pour ivresse et pour violences.

–        Vous êtes chasseur ?

–        Oui, monsieur.

–        Mais comment aviez-vous pu obtenir un permis avec une condamnation à 6 mois de prison ?

–        C’est très facile.

–        Sous votre nom ?

–        Oui, sous mon nom.

Chalus dit avoir connu Ferrand au café Vayssade qui, d’après la procédure, serait le rendez-vous de tire-laine et de souteneurs. Il allait y jouer aux boules. Chalus a épousé sa maîtresse, autrefois condamnée comme entôleuse.

–        Depuis que je la connais, dit-il, elle n’a pas subi de condamnation.

Chalus tenait une maison de tolérance à Toulon au moment de son arrestation. L’accusation lui reproche d’avoir été le jour du vol, en compagnie de Ferrand, dans une maison de tolérance à Abbeville. Chalus nie le fait. Il dit que les témoins ne l’ont tout d’abord pas reconnu et que ce n’est que sur les instances du juge d’instruction qu’un témoin l’a reconnu. Il se plaint de la façon dont l’instruction a été menée contre lui.

Le président – Il y a trente-cinq ans que je suis magistrat. Je n’ai jamais vu un accusé content de son juge d’instruction.

Une autre charge contre Chalus consiste en une lettre que Ferrand, détenu à Laon, lui a écrite. Il chargea un de ses codétenus, Collevaert, de la lui porter. Ferrand écrivit également à Sautarel et à Chalus. Chalus proteste et dit que les accusations de Collevaert ne peuvent être prises en considération, Collevaert est fou ; il est interné dans une maison d’aliénés. Sautarel proteste violemment. Son honneur, sa liberté sont en jeu, dit-il. On ne l’accuse qu’avec les déclarations d’un fou et d’un escroc. Ferrand dit que Chalus n’est pas son complice dans le vol Meurdesoif. Maria Blond, femme Longchamps, qui était dans la maison de tolérance d’Abbeville le 11 janvier 1902, amenée à la barre des témoins, croit reconnaître Ferrand et reconnaît Chalus.

–        Chalus contrefaisait l’Anglais, dit-elle.

Reine Antier, corsetière, 11, rue Deberly à Amiens, a été ajoutée à la liste des témoins. Elle a servi dans un restaurant deux individus le 11 janvier, jour du vol Meurdesoif. Elle reconnaît

Ferrand, mais dit ne pouvoir reconnaître Chalus. La tenancière de la maison d’Abbeville, nouveau témoin également, est amenée ensuite à la barre. Elle s’exprime d’une voix tellement faible que personne ne l’entend.

–        Vous entendez Me Jumel ? demande le président. Cela vous regarde.

–        Je n’entends rien.

Le président, s’adressant au témoin – Voyons parlez plus haut. Vous n’avez pas peur des hommes, vous ! (Hilarité prolongée dans l’auditoire.)

Le témoin ne reconnaît personne. Une confrontation générale a lieu mais ne donne aucune lumière. Les débats sont terminés sur le vol Meurdesoif.

M. Deuve est appelé de nouveau à la barre des témoins pour examiner une broche qui lui fut volée à son domicile à Rouen (vol dont on s’est occupé plus haut). Limonier est appelé à s’expliquer sur le fait que cette broche a été retrouvée chez lui. C’est un client de la maison Brunus qui la lui a vendue. Mais il ne sait pas son nom. Me André Hesse demande à M. le président pourquoi son client est suspect, comme il vient de le dire.

–        Mais il a été condamné pour escroquerie.

–        Il y a dix-huit ans, et en vertu d’une loi que nous connaissons tous, il est réhabilité, remarque Me André Hesse.

Me André Hesse explique ensuite que Limonier était l’employé de Brunus, qu’un jour un client de la maison apporta une broche pour la faire fondre. Limonier venait de se marier. Il trouva la broche jolie et l’acheta 90 francs pour l’offrir à sa femme. Il faut que l’accusation prouve qu’il savait que cet objet provenait d’un vol.

M. Pennellier donne lecture ensuite des dépositions faites par Gabrielle Damiens, décédée, et qui a été la maîtresse de Ferrand, se faisant alors appeler Dunin. Gabrielle Damiens fut un des pivots de l’instruction. Elle a fait les déclarations les plus graves et a porté la plupart des accusations retenues par l’instruction. Gabrielle Damiens, dans sa première déposition, donne des renseignements sur les habitants de la rue de la Clef, sur le vol de la rue Quincampoix, sur le vol Guénard à Amiens, sur un voyage qu’elle fit à Marseille, en compagnie de Ferrand, à la suite de ce dernier vol. Elle parle ensuite de l’entreprise de colportage que tenta Ferrand. Elle dénonce Vaillant, Jacob, Lazarine Roux, Sautarel, Bonnefoy, Ferré, Bour et d’autres comme étant en relation avec Ferrand. Elle les a reconnus sur les photographies qui lui ont été présentées. Gabrielle Damiens relate plusieurs circonstances dans lesquelles elle se trouva avec les uns ou les autres. Dans une deuxième déposition, Gabrielle Damiens parle des outils que Charles aurait arrangés pour son amant. Elle signale que Ferrand connaissait Deschamps. Elle parle de divers cambriolages.

M. Pennellier donne ainsi lecture de nombreuses dépositions de Gabrielle Damiens, contenant des détails sur les agissements de la bande, sur les vols commis.

Les accusés écoutent cette lecture avec attention, tout au moins ceux qui sont intéressés par ces déclarations. Bonnefoy et Sautarel, notamment, tendent l’oreille, se penchent en avant. Certains des accusés sourient ironiquement, les autres haussent les épaules.

M. Pennellier lit le procès-verbal de la confrontation entre Ferrand et Gabrielle Damiens. Ferrand y déclare que tout ce qu’a dit sa maîtresse est exact et avoue de nombreux cambriolages. Jacob se lève par instants et écoute la lecture des dépositions de Gabrielle Damiens que poursuit M. le substitut Pennellier. Il cherche dans une serviette qu’il apporte à chaque audience et en sort des pièces qu’il lit.

M. Pennellier a presque terminé sa lecture lorsque Sautarel brusquement se lève et avec

violence :

–        Est-ce que Gabrielle Damiens est une papesse et ses déclarations sont-elles donc infaillibles ? Si elle est une papesse, qu’on la canonise !

Jacob profite de cette interruption pour intervenir aussitôt. Il fait remarquer que M. Pennellier n’a pas lu une partie d’une confrontation entre Gabrielle Damiens et Ferrand, dans laquelle se trouverait ce passage : « Ici, Ferrand demande la permission d’emmener Gabrielle Damiens, ce qui lui est accordé ».

–        Ainsi, dit-il, on a permis à Ferrand et à Gabrielle Damiens de rester ensemble plus de trois heures, paraît-il ; cela parce qu’on voulait obtenir des aveux. Et à moi, jamais on ne m’a donné la permission d’embrasser ma mère !

M. Pennellier réplique qu’il n’avait pas cru devoir lire le passage auquel fait allusion Jacob, mais qu’il va le faire. Le passage n’est pas tel que le rapporte Jacob. Il est ainsi conçu : « Ici Ferrand demande la permission d’embrasser Gabrielle Damiens, ce qui lui est accordé. » Dans la copie signifiée aux accusés, de cette pièce de la procédure, le mot « embrasser » a été, par erreur, remplacé par celui de «emmener», explique M. Pennellier. On voit si Jacob a préparé sa défense et s’il a suivi avec soin toute l’instruction.

L’audience est levée sur ce vif incident qui rompit, après plus d’une heure, la monotonie de la lecture des dépositions de Gabrielle Damiens.

Au moment où on emmène les accusés, une personne se trouvant dans le fond de la salle, parmi le public debout, crie : « Bonjour Jacob ! » et agite en l’air une casquette. Un ami ou un plaisant ? Jacob lève en l’air son chapeau. Et le public, plus nombreux encore qu’au début de l’audience, s’écoule lentement.

AbbevilleAudience du 11 mars 1905

Vol de La Rivière à Abbeville

Le 27 septembre 1902, M. de La Rivière, qui était à la campagne, venait visiter sa maison sise à Abbeville, rue Aux-Pareurs, où il était venu pour la dernière fois le 13 septembre. Il fut surpris de ne pouvoir ouvrir la porte qui était fermée intérieurement à l’aide d’un verrou.

Ayant fait venir un serrurier, il constata qu’on avait fracturé la porte d’entrée et qu’on s’était introduit chez lui. Les pièces du rez-de-chaussée étaient intactes. Par contre, les pièces du premier étage servant de chambres à coucher avaient été bouleversées. Dans la chambre de Mme de La Rivière, l’armoire à glace qui renfermait de nombreux bijoux de grande valeur avait été fracturée ; les écrins vides étaient épars sur le lit. Dans la chambre à coucher de M. de La Rivière, le coffre-fort gisait éventré sur un matelas. Les autres pièces de la maison avaient été respectées.

Leur vol accompli, qui causait à M. de La Rivière un préjudice de 14 000 francs, les voleurs s’étaient retirés par la porte d’entrée et avaient fermé cette porte en tirant de l’extérieur à l’aide d’une ficelle le verrou intérieur.

Ce vol aurait été commis par Jacob, Ferré et Ferrand.

La présence de Ferrand à Abbeville dans la journée du 14 est établie par M. Maison qui le reconnaît et dit qu’il a touché pour lui un mandat télégraphique de 50 francs. Un télégramme expédié à Escande, boulevard Ornano et signé Escande a été écrit par Jacob, mais une correction que porte ce télégramme est d’une autre main, ce qui laisse croire que ce télégramme préparé par Jacob n’a pas été expédié par lui. Un grand nombre des objets volés chez M. de La Rivière furent saisis rue Leibnitz ; d’autres furent trouvés à Marseille chez les parents de la femme Ferré qui les tenaient de leur fille. Le revolver saisi sur Pélissard au moment de son arrestation après le crime de Pont-Rémy provenait de chez M. de La Rivière.

Jacob conteste le préjudice que M. de la Rivière dit lui avoir été causé.

–        Une rivière en brillants ? Ce n’étaient que des roses. Je l’ai revendue 200 francs, et elle valait au maximum 1500 francs.

Mme de La Rivière dépose. Jacob demande :

–        Où étaient les plaignants quand je me suis introduit chez eux ?

Le président – À la campagne.

Jacob – Ah! ils ont un château !… Ce ne sont pas des malheureux.

On rit. Ces premières escarmouches ont mis en goût le public. Ferré et sa femme prétendent avoir acheté les objets trouvés chez leurs parents à Marseille, mais ne pas savoir qu’ils avaient été volés. C’est Bour qui les leur a vendus. Me Philippe demande à Mme de La Rivière si elle peut affirmer reconnaître les jumelles saisies chez la mère de la femme Ferré ; et comme il le fait avec insistance, on murmure dans le public.

Audience du 11 mars 1905

Vol à l’église Saint-Jacques à Abbeville

Dans la nuit du 23 au 24 décembre 1902, des malfaiteurs s’introduisaient dans l’église Saint-Jacques à Abbeville, en fracturant la porte donnant sur la place Saint-Jacques, en face l’école.

Dans l’église ils forcèrent les troncs ; dans la sacristie, les armoires. Ils emportèrent un grand ostensoir, un petit ostensoir, deux calices en vermeil, un calice en argent ciselé, un petit calice gothique, un ciboire en vermeil, un ciboire portatif et divers autres objets.

Ce vol avait dû être commis par quatre individus qui étaient repartis pour Paris par l’express de 3 h 31 du matin. L’employé de service crut, plus tard, reconnaître Bour, Jacob et Pélissard comme étant trois des individus qui s’étaient fait déclasser leurs billets ; mais il ne peut rien affirmer.

La participation de Ferré et de Jacob dans ce vol est établie par les aveux de Jacob en ce qui le concerne et par une dépêche expédiée d’Abbeville à Mme Lemercier, rue Labrousse, n° 51 et signée «Georges ». Cette dépêche a été reconnue comme ayant été écrite par la femme Ferré. Or, dit l’accusation, c’est elle qui avait l’habitude de préparer pour son mari, qui ne sait pas écrire, les dépêches qui lui étaient nécessaires lorsqu’il partait en éclaireur.

M. Dorial, l’employé de la gare, dépose. Il croit reconnaître Ferré, mais n’en est pas sûr.

–        Puisque c’était Mercier ! dit ironiquement Jacob.

Interrogatoire de Pélissard

On arrive à un vol, le premier dans lequel est compromis Pélissard. M. le président l’interroge rapidement. Pélissard est né à Lyon le 15 juin 1867. Il été six fois condamné, notamment le 20 mai 1895 par la cour d’assises du Rhône, pour vol qualifié, à cinq ans de réclusion et cinq ans d’interdiction de séjour. Pélissard reconnaît les faits.

Audience du 14 mars 1905

Le vol Tilloloy à Abbeville

On passe au vol chez Mme Tilloloy à Abbeville, préliminaire du drame de Pont-Rémy. Rappelons brièvement ce drame dont nous relatons au début de ce procès toutes les circonstances. Dans la nuit du 21 au 22 avril 1903, Mme Leleu, femme d’un cafetier de la place Saint-Pierre, apercevait trois individus s’introduisant par une fenêtre dans la maison inhabitée alors de Mme Tilloloy. Son mari allait prévenir la police.

Les trois cambrioleurs, Bour, Jacob et Pélissard, s’enfuyaient et gagnaient Pont-Rémy où, à 6 heures du matin, les rejoignirent le brigadier Auquier en tenue et Léonard Pruvost en civil. Au cours d’une courte lutte, l’agent Pruvost trouvait la mort, le brigadier Auquier était blessé d’un coup de poignard et d’un coup de revolver.

M. Mathon dépose. Garçon de l’hôtel de France à Abbeville, il a servi Bour, le 20 avril, veille du jour du vol chez Mme Tilloloy. Bour lui a donné un pourboire et lui a dit, le tutoyant : «Tu gagnes bien ta vie ici ? – Si je ne la gagnais pas, je ne serais pas ici. – Vois-tu, les patrons, il faut tous les fusiller. »

–        C’est tout, termine le témoin.

M. Machin Albert, employé à la gare d’Abbeville, a reconnu Bour comme étant l’individu ayant laissé une sacoche à la consigne de la gare et l’en ayant retirée. M. Marcassin, employé des postes, a reconnu Bour comme l’individu qui lui a remis une dépêche, le 21 avril, signé «Georges ». Mme Tilloloy ne peut que fournir l’énumération des objets qui ont été soustraits à son domicile. M. Leleu, dans la nuit du 21 au 22 avril, a remarqué des individus pénétrant chez Mme Tilloloy par une fenêtre. Il avait entendu un bruit de vitre brisée. Il prévint sa femme, sortit et s’en fut avertir la police. M. le procureur général le félicite. Mme Leleu fait une déposition analogue à celle de son mari. Quand son mari fut parti, elle entendit un coup de sifflet venant de la direction du Pilori. Ensuite elle vit trois hommes prenant la fuite.

Un mouvement se produit dans la salle quand l’huissier appelle le nom du brigadier Anquier.

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