L’arrestation de Jacob : la version de la justice


Amiens, le 23 avril 1903

AbbevilleLe procureur général près la cour d’Amiens a l’honneur de porter à la connaissance de M. le Garde des Sceaux les faits suivants :Dans la nuit du 21 au 22 avril courant, trois cambrioleurs étrangers au pays ont pénétré par effraction et par escalade dans l’habitation de la veuve Tilloloy, rentière, place Saint Pierre à Abbeville. Surpris par un voisin qui avisa la police, les malfaiteurs prirent la fuite dans la direction de Pont Rémy.

Le brigadier de police Auquier et l’agent Pruvost se rendirent par chemin de fer à Pont Rémy où ils arrivèrent à six heures du matin. A la gare, ils trouvèrent ces trois malfaiteurs se disposant à prendre le train pour Boulogne.

Les agents de police les firent entrer dans les bureaux du chef de gare pour les interroger. Dès le début de l’interrogatoire sur la tentative de vol commise à Abbeville, l’un des malfaiteurs prit la fuite, suivi par l’agent Pruvost. Dans la salle des pas perdus, l’agent Pruvost reçut du fuyard deux coup de revolver dans l’abdomen puis deux coups de poignard entre les épaules. La mort fut presque instantanée.

La gare de Pont Rémy en 2007Les deux autres malfaiteurs, armés d’un revolver et d’un poignard, furent saisis par le brigadier Auquier et un employé de gare.

Dans la lutte, Auquier reçut un coup de revolver dans l’abdomen, qui produisit une blessure, puis deux coups de poignard, l’un dans la région du cœur et l’autre au bras gauche. Aucune de ces blessures ne mit la victime en danger.

Les deux derniers malfaiteurs prirent immédiatement la fuite, abandonnant une sacoche contenant une trousse de 75 fausses clefs, 60 cartouches de revolver et divers autres objets à l’usage des cambrioleurs.

Aussitôt prévenues, les brigades de gendarmerie d’Abbeville et de Pont Rémy, ainsi que le parquet, se sont rendus sur les lieux.

Les signalements de ces trois criminels ont été envoyés dans toutes les directions.

Deux de ces malfaiteurs ont été arrêtés par la gendarmerie. Un près d’Airaisne et l’autre près de Picquigny, quant au troisième, il n’a pu être encore rejoint.

Ces criminels ont été conduits sous bonne escorte à la maison d’arrêt mais, pour la traversée d’Abbeville, un peloton de chasseurs à cheval a du être requis pour prêter main forte à la gendarmerie ; une foule hostile voulait faire un mauvais parti à ces prisonniers.

L’agent Pruvost, décédé, a été reconduit à son domicile et le brigadier Auquier est soigné à Pont Rémy.

E.Regnault

source : Archives Nationales, BB18 2261A, dossier 2069A03

Jacob 1903Si l’on compare cette version avec celle donnée par Jacob dans les Souvenirs d’un révolté, nous pouvons nous apercevoir de la véracité des faits avancés par l’illégaliste anarchiste. Le voleur arrêté à Airaisne est Jacob lui-même : « Airaisnes … ! Pour le plus grand nombre de bipèdes parleurs qui peuplent la terre, ce mot ne signifie pas grand chose. (…) Mais pour moi, ce mot c’est une catastrophe. C’est mon Waterloo. Mes cent jours n’auront duré que cinq heures ! Comme tout dégénère!« . L’arrestation à Picquigny concerne Pélissard. Félix Bour, quant à lui, se fait prendre par les (fins ?) limiers d’Hamard alors qu’il espère trouver refuge au domicile parisien de son ami Jacob. L’affaire dite des « Bandits d’Abbeville » est lancée par ce que la presse nomme immédiatement, dans un contexte d’insécurité généralisée et instrumentalisée, « le drame de Pont Rémy ».

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