WIKI nimportnawak ou presque …


logo WikipédiaSi les encyclopédies libres sur le Net permettent d’élargir ses connaissances sans avoir à débourser le moindre brouzouf, la moindre petite pépète, le moindre petit règlement par paypal interposé, ils n’en présentent au moins un inconvénient. Et non des moindres. Il tient à la fonction même de la dite encyclopédie libre. L’information distillée par nimportawik peut aboutir à nimportnawak dans la mesure où il n’y a pas vérification des révélations faites. Ne pas généraliser bien sûr. La plupart du temps, l’article sollicité est fiable … parait fiable. Mais force est de constater que, lorsqu’il s’agit de l’honnête cambrioleur prénommé de manière anachronique Marius dans Wikipédia, le mythe lupinien a de nouveau et inéluctablement valeur de loi. Il est alors « l’anarchiste qui inspira Maurice Leblanc ». D’autant plus réducteur que de toute évidence l’inspiration du texte qui suit provient d’ouvrages biographiques à prétention historique, comme a pu le noter l’avant-propos des Ecrits de Jacob parus chez L’Insomniaque en 1995. Nous avons mis en gras les passages de l’article qui nous semblent sujets à caution. Passons sur le gentleman cambrioleur et remarquons quelques errements apocryphes sur un soi-disant illégalisme « pacifiste » (même avec usage des guillemets) ou sur l’usage systématique du pseudonyme Attila. L’illégaliste anarchiste Jacob, qui vole certes mais qui ne se mêlerait pas à la masse plébéienne des criminels maffieux, n’a finalement usé que parcimonieusement des billets vengeurs dans les riches demeures visitées. L’utilisation de la violence à des fins de légitime défense, reprenant la célèbre formule de Clément Duval, ne se fait pas que sur les tristes sicaires de l’Ordre Publique et social même si c’est l’agent Couillot, à Orléans, qui reçut les pruneaux du voleur Jacob. Mais les fables ont la vie dure : ainsi le cambriolage de la maison de Pierre Loti ou encore celle d’une très très hypothétique riche marquise. Dans les deux cas, le voleur se fait généreux et repart en remboursant ses dégâts. La correspondance du vieux marchand forain (et là on peut l’appeler Marius) avec Jean Maitron en 1948 vient de facto nier ces deux inepties transmises par le commandant Michel en 1937 dans le magazine Confessions des frères Kessel. Mais Jacob sait aussi se faire pédagogue et prosélyte. L’auteur de l’article insistera alors sur l’agent de police que l’on tente de convertir à la Cause !!! Ou encore sur l’ouvrier qui ne pense qu’à sa retraite. En guise d’ouvrier, l’anecdote ici retranscrite, reprend le propos Nacavant, chef de la gare de Pont Rémy, transmis par Jacob lui-même dans les Souvenirs d’un révolté. Petit à petit, nous avançons dans l’histoire du vrai-faux Arsène Lupin. Différence fondamentale avec Raoul d’Andrésy : le voleur anarchiste, le théoricien de l’illégalisme lors du procès d’Amiens finit sa délictueuse carrière au bagne. Peu de choses à vrai dire là-dessus. Seule la libération du matricule 34777 retient notre attention. Certes, l’année de la liberté retrouvée est juste mais l’homme libre se retrouve à l’hôpital. Le fait serait avéré dans les deux biographies précédemment évoquées. Alexandre Jacob sort libre et sur ses deux pieds de la prison de Fresnes le 30 décembre 1927. Et sa nouvelle vie reprend le fil conducteur de l’aventure, mélangeant des amitiés non vérifiées, avec Louis Lecoin notamment, qu’il n’aurait réellement connu d’après le propos de Guy Denizeau qu’à Lussault sur Loire en 1953 !!! Ce sont alors quelques épisodes supposés croustillant de péripéties : Jacob lutte pour faire libérer Sacco et Vanzetti. Les deux innocents sont grillés par la chaise électrique au mois d’août 1927 alors que le prisonnier Jacob croupit encore dans les cellules de la République française. Jacob fait le coup de feu en Espagne mais pour y être utile aux camarades, Jacob ouvre grand sa maison pour accueillir les résistants berrichons luttant contre l’envahisseur nazis, etc. Bref, la vie de Jacob, ou plutôt « Les vies d’Alexandre Jacob », se lit encore ici comme un roman. Ce qui est relativement dommage pour un article à caractère informatif et synthétique, ayant valeur de référence, que l’on retrouve systématiquement en première position dans les moteurs de recherche du web et qui finit par dire nimportnawak … ou presque.

Marius Jacob

Un article de Wikipédia, l’encyclopédie libre

Marius Jacob, né Alexandre Jacob le 29 septembre 1879 à Marseille et mort le 28 août 1954 à Reuilly, est un anarchiste illégaliste français. Cambrioleur ingénieux et doté du sens de l’humour, capable de grande générosité à l’égard de ses victimes, il sera (entre autres « illégaux » de la Belle Époque) un des modèles dont Maurice Leblanc s’inspirera pour créer le personnage d’Arsène Lupin.

Une dure formation à la vie

D’origine alsacienne, Marius Jacob naît dans un milieu prolétaire et s’engage à douze ans comme mousse pour un voyage qui le mènera jusqu’à Sydney où il désertera. Il aura connu dans ce voyage le haut (« jet set » en croisière) et le bas (marins aux désirs desquels il se refuse, bagnards et esclaves transportés) de la société (« J’ai vu le monde ; il n’est pas beau »). Après un bref épisode de piraterie, à laquelle il renonce par rejet d’une trop grande cruauté, il revient à Marseille en 1897 et abandonne définitivement la marine, miné par des fièvres qui l’accompagneront toute sa vie. Apprenti typographe, il fréquente les milieux anarchistes et y rencontre Rose avec qui il vit.

Les socialistes parlementaires de cette fin de siècle s’opposent, souvent violemment, aux anarchistes libertaires du monde ouvrier. D’un côté, les uns se veulent légalistes et tentent de parvenir au pouvoir par les élections, de l’autre les anarchistes pensent que la justice sociale ne se discute pas et qu’elle se prend ! Dans l’Europe de la Belle Époque, suivant la répression de la commune de Paris, des révoltés tendant vers l’acte individuel violent pour rendre justice, font tomber des rois, des politiciens, des militaires, des policiers, des tyrans, des magistrats sous leurs armes qui éclatent un peu partout dans le monde ! Des dizaines de militants anarchistes sont emprisonnés et certains guillotinés, pendus, etc. Les libertaires sont traqués, des hommes comme Ravachol sont condamnés à avoir la tête tranchée, mais surtout le terrorisme les rend impopulaires, ce qui nuit à leur cause.

Fiché, compromis dans une affaire d’explosifs et quelques menus larcins, condamné à six mois de prison, Jacob ne peut se réinsérer. Il va alors choisir « un illégalisme pacifiste » (« Puisque les bombes font peur au peuple, volons les bourgeois, et redistribuons aux pauvres ! »).

Le 31 mars 1899, un commissaire de police et deux inspecteurs se présentent chez un commissionnaire au Mont de Piété de Marseille. L’accusant du recel d’une montre, ils l’arrêtent, après avoir dressé durant trois heures, sur papier à en-tête de la Préfecture de police, l’inventaire de tout le matériel en dépôt, qu’ils confisquent comme pièces à conviction. L’homme est emmené menotté au Palais de Justice tandis que les trois individus s’esquivent, emportant un butin d’environ 400 000 francs. Les policiers n’étaient autres que Jacob et deux compères. La France entière en rit.

L’anarchiste qui inspira Maurice Leblanc

Arrêté à Toulon le 3 juillet 1899, Jacob simule la folie (il a des hallucinations dans lesquelles il est agressé par des jésuites !) pour éviter cinq années de réclusion. Le 19 avril 1900, il s’évade avec la complicité d’un infirmier de l’asile d’Aix-en-Provence et se réfugie à Sète. Il organise alors sa bande, nommée « Les Travailleurs de la nuit ». Les principes en sont simples : on ne tue pas, sauf pour protéger sa vie et sa liberté, et uniquement des policiers ; on ne vole que les parasites, les patrons, les juges, les militaires, le clergé, jamais les professions utiles : architectes, médecins, artistes… Un pourcentage de l’argent volé est reversé à la cause anarchiste et aux camarades dans le besoin, ce qui n’ira pas sans poser de problèmes. Il évite de travailler avec les anarchistes idéalistes comme avec la pègre, très réactionnaire en général, choisissant comme complices des déclassés, illégalistes comme lui.

L’astuce de Jacob est sans limite. Pour voir si ceux qu’il projette de cambrioler sont chez eux, il coince des morceaux de papier dans leurs portes et passe le lendemain vérifier s’ils sont toujours en place ; c’est de plus un as du déguisement. Autre astuce : il achète une quincaillerie et se fait livrer des mécanismes de coffres-forts pour s’entraîner à les crocheter, activité dont il devient un expert (toute sa vie d’ailleurs il se lança en autodidacte dans des études diverses, les approfondissant jusqu’à devenir chaque fois un spécialiste de la question). Mais sa plus belle invention est « le coup du parapluie » : un trou dans le plancher de l’appartement du dessus, un parapluie fermé glissé dans le trou, ouvert ensuite par un système de ficelles, pour récupérer les gravats et éviter le bruit de leur chute. Il lui arriva de refermer les portes par un de ses mécanismes de ficelles et de morceaux de bois, de manière à faire croire qu’il était toujours à l’intérieur ; il assista une fois de la terrasse d’un café à un assaut en règle donné à une maison pillée dans la nuit.

On voit que son humour se donne libre cours également : il signe ses forfaits d’une carte au nom d’Attila ; il y laisse parfois des mots, comme « Dieu des voleurs, recherche les voleurs de ceux qui en ont volé d’autres. » (Rouen, église Saint-Sever, nuit du 13 au 14 février 1901). Il fait parfois preuve d’une classe inattendue dans ce milieu : cambriolant la demeure d’un capitaine de frégate, Julien Viaud, il s’aperçoit soudain qu’il s’agit de Pierre Loti, remet tout en place et laisse un de ses fameux mots : « Ayant pénétré chez vous par erreur, je ne saurais rien prendre à qui vit de sa plume. Tout travail mérite salaire. Attila. – P.S. : Ci-joint dix francs pour la vitre brisée et le volet endommagé. » Un jour, découvrant qu’une marquise qu’il imaginait richissime était en fait criblée de dettes, il lui laisse 10 000 francs or.

Bien qu’il l’ait toujours nié, Maurice Leblanc s’inspira de lui (entre autres, il est vrai) pour créer, en 1905 d’ailleurs, son personnage d’Arsène Lupin.

Avec des groupes de deux à quatre personnes, il commet entre 1900 et 1903 de 150 à 500 cambriolages, à Paris, en province et même à l’étranger (« Je faisais de la décentralisation »). Mais Jacob sait déjà que le combat est perdu : un jour qu’il essaie de convertir un ouvrier à l’anarchisme, il obtient une réponse significative : « Et ma retraite ? »

Le 21 avril 1903, une opération menée à Abbeville tourne mal. Après avoir tué un agent[1] et s’être enfuis, Jacob et ses deux complices sont capturés. Il fait du procès, qui se tient à Amiens deux ans plus tard, dans une ville en état de siège et hantée par les anarchistes, une tribune pour ses idées, étonnant par sa truculence, son sens de la répartie, son idéalisme, et son intelligence : « Vous savez maintenant qui je suis : un révolté vivant du produit de ses cambriolages. » ; « Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend. »

Il réplique au président du tribunal qui lui demandait pourquoi, lors d’un cambriolage, il avait volé un diplôme de droit sans valeur marchande : « Je préparais déjà ma défense. » On est obligé de changer périodiquement ses gardiens, car il les convertit à l’anarchisme. Il échappe à la guillotine, mais est condamné à perpétuité au bagne de Cayenne.

Le bagne et la résurrection

Du bagne, il entretient une émouvante correspondance avec sa mère Marie, qui ne l’abandonna jamais ; il tente de s’évader 17 fois avec une remarquable ingéniosité et, face à une administration pénitentiaire qui cherche à le détruire, il doit à son intelligence (il étudie le droit pour venir en aide à ses compagnons… ainsi qu’à lui-même) et à son énergie de rester incorruptible et inentamé sur le plan moral ; en revanche ses forces physiques sont gravement atteintes.

Revenu en métropole suite à la campagne contre le bagne lancée par Albert Londres, il finit d’y purger sa peine jusqu’en 1927. Libéré, remis sur pied dans un hôpital, il travaille au Printemps, puis se fait marchand ambulant dans le Val de Loire et en Touraine, s’installant à Reuilly dans l’Indre avec sa compagne Paulette (Rose est morte pendant son séjour à Cayenne) et sa mère. Il se sent bien dans le milieu forain car ce dernier est, sinon ouvert à l’anarchisme théorique, du moins proche de sa générosité.

En 1929, Jacob se présente dans les locaux du journal Le Libertaire dirigé par Louis Lecoin. Les deux hommes se ressemblent et se lient d’amitié. Si Jacob (qui a pris le prénom de Marius parce que c’est moins long qu’Alexandre, et donc moins cher à écrire sur le calicot de son étal) ne reprend pas ses activités lucratives, il s’investit dans la propagande. Après les combats de soutien pour les objecteurs de conscience et ceux pour Sacco et Vanzetti, les libertaires apportent leur soutien pour empêcher l’extradition de Durruti promis à l’exécution capitale en Espagne.

En 1936, il va à Barcelone dans l’espoir de s’y rendre utile à la CNT, mais comprenant que, pour lui comme pour l’Espagne, c’est sans espoir, il revient sur les marchés du centre de la France, en parcourant ces marchés et les foires du centre, il achète en 1939, une maison à Reuilly : « Le pays où il ne se passe jamais rien », et s’y marie en 1939. Il semble qu’il ait laissé un bon souvenir aux habitants de la commune : sa maison et sa tombe y font aujourd’hui partie des sites à visiter. En octobre 2004, une impasse est baptisée à son nom et une exposition lui est consacrée à l’Office du tourisme en novembre.

S’il ne s’engage pas dans la Résistance (il y eut très peu de réseaux anarchistes, même si certains libertaires, essentiellement espagnols, participèrent au mouvement de libération), les partisans savent pouvoir trouver refuge chez lui. Après la mort de sa mère (1941) et de sa femme (1947), il vieillit entouré d’amis et de camarades de discussion (Pierre-Valentin Berthier, écrivain anarchiste et sa femme, Jean Maitron, auteur du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier, R. Treno, le directeur du Canard enchaîné, et bien d’autres), ne renonçant jamais ni à sa verve, ni à ses opinions, ni à ses provocations d’homme libre (devant payer un impôt pour son chien, il réclame une carte d’électeur pour ce dernier, qui « n’a jamais menti, jamais été ivre. Aucun de vos électeurs ne peut en dire autant »).

Une fin de vie digne

En 1953, il rencontre un couple de jeunes enseignants, Robert et Josette. Profonde amitié entre les deux hommes. Et passion partagée avec la jeune femme, à qui il accorde, malgré sa décision d’en finir avec la vie maintenant que son corps le lâche, une année.

Le 28 août 1954, il s’empoisonne, à l’aide d’une injection de morphine et d’un poêle à charbon détraqué, avec son vieux chien, Négro, laissant le dernier de ses fameux mots : « (…) Linge lessivé, rincé, séché, mais pas repassé. J’ai la cosse. Excusez. Vous trouverez deux litres de rosé à côté de la paneterie. À votre santé. »

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