Le BERRY MAGAZINE ne désarme toujours pas


Berry Magazine, n°86Le n°85 du Berry Magazine (avril, mai, juin 2008) nous a permis de constater que les mythes ont la vie dure. De toute évidence, l’auteur des deux articles consacrés à Alexandre Jacob et à Claude Nerrand, à moins que ce ne soit sa très « hiérarchique » direction, n’a pas très bien compris le sens des mots critique, historiographie et analyse, leur préférant en réponse à la notre le terme de « sérieusement orienté » pour qualifier notre étude de ces deux articles, qu’il trouve pourtant « intéressante ». Il n’est pas question pour nous bien sûr de nier l’orientation politique sérieuse qui est la notre. L’histoire est tout sauf une science objective. Reprocherait-on à Jacques Marseille ses prises de positions très à droite lorsque ce dernier évoque le rapport économie-colonisation dans son célèbre ouvrage ? Reprocherait-on à Jean Maitron d’être communiste quand il se penche sur l’histoire du mouvement anarchiste français ? Remarquons juste que les prises de positions de Claude Nerrand ne sont pas critiquées de la sorte. Remarquons enfin que ce journal considère les vols de Jacob comme moralement « discutable ». La raison : l’homme, que le Berry Magazine ne qualifie pas d’honnête, parce que voleur, a été condamné et a purgé sa peine au bagne !!!  Il faudrait alors se poser la question : s’agit-il de morale ou d’histoire ? Ou encore : de quelle morale peut-il bien s’agir ici ? Le mail que nous avons envoyé à Monsieur Drouet et que nous avons inclus en commentaire dans l’article « le BERRY MAGAZINE ne désarme pas » a été publié dans le n°86 de ce journal. Force est alors de constater qu’il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. D’où, certainement pour ne pas choquer le lecteur berrichon, une publication non intégrale et quelque peu remaniée de notre mail. Nous avons mis en gras les passages tronqués et remaniés. Exemple : « maison poulaga » devient « gendarmerie », l’allusion à la profession du retraité Nerrand passe à la trappe, le terme « patelin » disparaît, « peut me chaut. A vrai dire je m’en fous » a été remplacé par « c’est une chose », etc. La réponse de la Rédaction est du même acabit. Elle préfère se référer à l’ « incontournable » Claude Nerrand plutôt que « de vérifier les sources indiquées ». A moins qu’il ne s’agisse de torpeur intellectuelle, ou encore d’une mauvaise foi caractérisée. Notons encore que le Berry Magazine ne mentionne l’existence ni du jacoblog ni du livre paru à l’ACL. A la place, et en illustration : une photographie du barnum Marius, une de Maurice Leblanc, et un portrait d’Arsène Lupin. No comment ! 

 

Berry Magazine, n°86, courrier des lecteursBerry Magazine

N°86, juillet 2008

p.68 : Courrier des lecteurs

Marius Jacob fait débat

L’habitant de Reuilly, qui servit de modèle (ou pas) à Maurice Leblanc pour créer Arsène Lupin, a suscité cette réaction d’un lecteur bien informé, mais aussi sérieusement orienté :

[ VOIR, CI-DESSOUS, Mail envoyé à Sébastien Drouet le 10 juin 2008 ]

Berry Magazine, n°86, courrier des lecteurs, réponse de la rédactionRéponse de la rédaction

L’objet de cet article n’était pas de porter atteinte à la mémoire de Marius Jacob. Au contraire, il s’agis­sait de rappeler la vie du Reuillois d’adoption, les rai­sons qui l’ont conduit jusqu’en Berry et d’évoquer sa ressemblance supposée avec Arsène Lupin.

Rappelons que cet article était réalisé dans le cadre d’une rubri­que intitulée «  En passant par Reuilly ». Claude Nerrand, président de l’office de tourisme local et organisateur d’expositions consacrées à l’anarchiste est incontournable au moins sur cette ques­tion … qui suscite un débat, ce dont nous nous réjouissons.

Nous tenons cependant à répondre à quelques reproches formu­lés par M. Delpech :

1) L’ « ancienne conduite » dont nous parlons était pour le moins discutable. N’a-t-elle pas valu des années de bagne à Marius Jacob?

2) Nous avons jugé qu’il s’agissait là d’un clin d’oeil, dans la me­sure ou Alexandre se fera appeler « Marius » des années après avoir quitté Marseille.

5) Nous confirmons ce que nous écrivions : Marius Jacob avait de « faux amis », ceux qui disaient, après sa mort, avoir bien connu notre homme alors qu’ils ne lui ont jamais souhaité qu’un « bonjour» au un « bonsoir » …

Nous n’avons pas été en mesure de vérifier les sources indiquées par M. Delpech dans ses remarques 3 et 4. Nous lui en faisons crédit.

 

06 juin 2008. Réponse de Sébastien Drouet, auteur des deux papiers sur Alexandre Jacob et Claude Nerrand à notre article du blog « Le BERRY MAGAZINE ne désarme pas« , mis en ligne le 6 mai 2008.

Entre nous, “outragé et inquisiteur”… c’est ce que je me suis dit en lisant votre article.
Je n’ai pas voulu dresser le tableau d’un homme “couard devant l’autorité” parce qu’il changeait de trottoir devant la gendarmerie. Vous déformez le propos, franchement.
Les “erreurs grossières”, je les attends, et je suis prêt à passer un rectificatif dans le prochain numéro.
Content, en tout cas, de vous avoir fait rire à ce point.

Sébastien Drouet.

 

Mail envoyé à Sébastien Drouet le 10 juin 2008

Bonjour,

Je viens juste de mettre le texte ci-dessous en réponse à votre commentaire sur le blog Jacob :

Entre nous, vos deux articles sont critiquables, au sens premier du terme, et c’est ce que j’ai fait. A vous de trouver ces critiques, outragés et inquisitoriales. Critiquable sur le fond comme sur la forme. La forme d’abord, certes, ce n’est pas vous qui dites que Jacob changeait de trottoir devant la maison poulaga. Mais alors pourquoi faire de cette information, que M. “l’historien” Nerrand répète à foison et à loisir, et à qui veut l’entendre, un surtitre que le lecteur accrochera fatalement (page 19). Jacob est présenté comme quelqu’un qui brave l’autorité mais à la fin de sa vie, le voilà qui change de trottoir. Non, ce ne peut donc être un héros ! D’où l’emploi du terme couard qui rime avec anar évidemment ! Ce que finalement on peut vous reprocher sur la forme, c’est votre source : “Pour ce qui est de la précision des infos, nous irons voir ailleurs. Auprès de M. Nerrand par exemple”. Même au niveau local, M. le “professeur” Nerrand donne des approximations et vilipende tous ceux qui contrediraient son propos. M. Nerrand se défend de faire de Jacob un Arsène L. mais pourquoi lors des deux expositions qu’il lui consacre en 1993 et en 2004, un haut de forme assorti des principaux ouvrages de Maurice Leblanc figurent-ils au centre de la dite exposition, sise à l’office du tourisme ? Certes, il n’y a pas d’objectivité en histoire. Mais force est de constater que la vision d’Alexandre Jacob oscille entre l’aventurier et Arsène Lupin. Il s’agit d’historiographie locale. Comment percevoir autrement un tel homme en occultant ce qui ne peut objectivement l’être ? Savoir comment comprendre l’illégalisme, acte politique avant tout. Jacob le dit d’ailleurs à son procès : “J’ai mis à nu toute mon existence de lutte, je la soumets à vos intelligences”. Celui qui ne tente pas de saisir les actes de Jacob, tant durant la période des cambriolages, qu’au bagne ou après, par le prisme de l’idée et de la pensée ne peut donc s’orienter que vers ce genre de stéréotype facile. Jacob = aventurier. Et puis cela fait vendre, c’est une évidence locale et nationale. M. le “professeur” et “historien” Nerrand “qui ne désarme pas” (c’est pour le côté ancien lieutenant colonel peut-être ?) me l’a d’ailleurs affirmé lors de notre première rencontre. Là se limiterait l’intérêt qu’il a pour Jacob, un simple faire valoir de son patelin, charmant village d’ailleurs. Reste les a priori du président de l’office du tourisme, béotien en anarchie et surtout dotée d’une vision particulière des gens. Qu’il n’éprouve pas de particulière sympathie pour son personnage, peut me chaut. A vrai dire je m’en fous. Mais il y a malhonnêteté intellectuelle à nier au pire, à minimiser l’engagement politique réel d’un homme. Il procède de la même manière avec Pierre Valentin Berthier qualifié par lui “d’anarchiste de salon”.
Reste alors le fond et les quelques grossières erreurs :
1) p. 20 : “Marius s’est refait une conduite” ça s’est du parti pris. En quoi l’ancienne conduite était-elle mauvaise ?
2) p.20 : “Marius, comme un clin d’oeil à sa ville natale”, il aurait peut-être fallu établir une généalogie de la famille Jacob-Berthou. Mais où y-a-t-il clin d’oeil dans une région où le prénom Marius est des plus communs ?
3) p.21 : “aux îles du Salut et notamment sur l’île du Diable” : nous y voilà, l’argument vendeur par excellence, Jacob et Dreyfus !!!!! Mais l’île du Diable est consacrée aux détenus politiques depuis 1895, c’est à dire depuis Dreyfus. Les anarchistes, en vertu des lois scélérates de 1893-1894, sont considérés par la justice française comme des droits communs et sont systématiquement envoyés sur les … les deux autres îles de l’archipel. Jacob n’a jamais pu se trouver sur le même caillou que le fameux capitaine. Ca s’appelle d’autant plus une belle bourde, que la simple lecture d’un ouvrage soit sur le bagne, soit sur le mouvement anarchiste vous aurez permis d’éviter de faire la même erreur que Bernard Thomas en 1970 et que … Claude Nerrand par la suite.
p.21 : “libéré le 30 décembre 1928″ : faux ! L’erreur vient du livre d’Alain Sergent. Jacob est libéré le 30 décembre 1927. Le fait est vérifiable dans les archives de la prison de Fresnes mais également aux archives de la préfecture de police de Paris mais encore aux archives de l’outre-mer et pour finir dans le fonds Jacob du CIRA de Marseille. Une année de liberté en plus permet ainsi d’expliquer plein de choses.
p.21 : “entouré de ses vrais amis” : parce qu’il y en a eu de faux ? Pourquoi ne pas avoir parlé de Robert et Josette Passas, à qui le vieux Marius a donné toutes ses archives personnelles, et pour qui il a envisagé vers 1953 de commettre un dernier cambriolage afin de pouvoir les rejoindre au Maroc ?
Je comprends bien que vous vous sentiez offensé par l’article que j’ai mis en ligne sur ce blog. Mais votre article comme ce blog d’ailleurs, sont autant d’éléments historiographiques utiles et intéressants. Ma démarche, pour finir, a pour but de replacer l’homme dans son contexte. Sans quoi la vision de ce personnage ne peut être que tronquée ou localement réduite. Je ne saurais vous conseiller et vous recommander de lire mon ouvrage paru récemment aux éditions de l’Atelier de Création Libertaire.
Bien à Vous

Jean-Marc Delpech

 

Mail de Sébastien Drouet reçu le 11 juin 2008

Très intéressant. Quand vous écrivez « Sans quoi la vision de ce personnage ne peut être que tronquée ou localement réduite »… C’est malheureusement la limite d’un article de magazine ! Souhaitez-vous publier cette réponse ? (en vous présentant plus précisément, et sous réserve d’acceptation de ma hiérarchie.)

 

Réponse au mail ci-dessus, envoyé le 11 juin 2008

Bonjour,

Pas de problème pour la publication. Vous faîtes comme bon vous semble. Le texte ne m’appartient plus. Je l’ai écrit c’est tout. Un peu comme pour « l’honnête cambrioleur ». Le site du salon du livre libertaire a mis en ligne l’interview que j’ai donnée à l’occasion. Vous pouvez toujours aller y faire un tour. Voici le lien :

http://media.radio-libertaire.org/2008/salonlivrelibertaire/salonlivrelibertaire.html

Bien à vous

Jean-Marc Delpech

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