Le travailleur libre


façade du PrintempsPierre Aron, n’a strictement rien avoir avec André son homonyme qui a activement participé à la campagne de libération de Jacob en 1925. Eugène Dieudonné nous apprend que le premier fut l’ami d’Albert Londres. Cet entrepreneur dirige la maison Marivaux qui fabrique des articles de décoration intérieure, écoulés entre autre par le magasin Le Printemps. La lettre que Jacob reçoit le 11 mars 1928 confirme l’embauche du bagnard peu de temps après sa libération. C’est donc un travailleur libre et socialement intégré qui va pendant trois ans diriger l’atelier de Pierre Aron avant de se faire marchand forain en 1931. Ce poste lui permet, par ses capacités techniques et son sens de l’organisation et des relations humaines, d’améliorer la productivité de son entreprise mais surtout de faire breveter des objets de son invention. Et, de la vente de ces brevets, naît la possibilité d’un travail et d’une vie encore plus libre : celle de marchand forain.

 

 Paris le 11 mars 1928

Monsieur André Jacob

1 passage Etienne Delaunay

Paris

Monsieur,

Mon ami Kaplan me téléphone aujourd’hui qu’il aurai t un besoin presque immédiat de vous. Il serait donc indispensable à mon point de vue que vous en parliez à Chanel, que Je pourrais faire toucher par mon ami Estève, car comme c’est une situation d’avenir et de confiance,  i1 n’y a pas lieu d’hésiter.

De toutes façons répondez à Monsieur Kaplan, afin de sa voir si oui et quand il pourrait compter sur vous ; je crois qu’il faudrait que vous soyez disponible pour mercredi.

Je ne vous cacherais pas qu’en employeur ayant besoin d’un employé d’une façon absolue, toutes les considérations sentimentales disparaissent devant ce fait positif.

Réfléchissez donc et agissez comme vous croirez devoir le faire.

Mes bons souvenirs à votre mère.

Mas bons sentiments.

Aron

15 boulevard des Italiens

Annotation de Jacob, sans date : lettre de Pierre Aron, directeur de « Marivaux ». C’est lui qui m’a embauché avec Kaplan Paul. Par la suite, j’ai dirigé l’atelier.

 

 

le grand magasin Le Printemps à ParisLundi 23 septembre 1928

Cher Monsieur,

Je vous envoie ci-inclus une lettre d’introduction auprès de M. Pasquier chef étalagiste au Printemps. On le rencontre le matin à la Direction, 112 rue de Provence. Je lui ai dit un mot de votre (société) et lui ai laissé votre carte.

Brevet –Nous ne pourrions rencontrer l’agent de brevet en dehors des heures « ouvrables » (je vais cependant lui demander si samedi prochain il serait libre, exceptionnellement. Je vous téléphonerai).

Vous pourriez m’expliquer l’affaire et comme je dois voir M. de Keravenant pour moi, je la lui transmettrai. D’ailleurs, il est nécessaire d’établir un texte à l’avance, à peu près conforme au définitif.

Je pourrais vous rencontrer mercredi soir à 7 heures moins le quart chez Jennanc, cité Condorcet. Si non mercredi, vendredi même heure. Pour me téléphoner, demander le Printemps, service architecture.

Très heureux si je puis vous être tant soit peu utile.

Sincèrement

J.Michaut

 

Eugène Dieudonné, La vie des forçats, 1930, p.248 :

Ceux qui reviennent légalement n’ont plus qu’un souci : vivre en paix. (…) Après vingt-six ans de bagne, Barrabas est à Paris. J’ai vu son patron qu’Albert Londres connut à Salonique pendant la guerre : « Barrabas est un homme étonnant, m’a-t-il dit. Je l’ai pris comme chef d’atelier. Il a supprimé la moitié de mes frais généraux. C’est un chercheur, un inventeur. Il dirige un atelier de trente femmes avec un tact rare. Mes anciens chefs n’en pouvaient rien faire. Avec lui, elles travaillent en chantant et gagnent davantage. S’il partait, je perdrais un précieux collaborateur.

 

Sources :

Fonds Jacob, CIRA Marseille

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