Rose est morte


Rose Roux Jeune ?Lazarine Rose Roux, dite Henriette Beziat, est née à Marseille le 17 septembre 1868.  Rose aurait été la compagne de Jules Clarenson avant d’unir sa destinée à celle d’Alexandre Jacob. Dès le début de l’instruction menée par le juge Hatté d’Amiens, Rose Roux retient l’attention. Nettement plus âgée que son amant de voleur, elle manifeste les mêmes opinions que lui. Circonstances aggravantes, cette ancienne prostituée marseillaise a négocié une partie du butin du vol Bourdin (rue Quincampoix, Paris, 6 octobre 1901) et s’est fait prendre à chaparder dans le grand magasin parisien Le Bon Marché.

Arrêtée, à Paris le 24 avril 1903, à la suite du « drame de Pont Rémy » avec Marie Jacob, elle est mise à l’écart durant toute la durée de la détention provisoire de la « bande sinistre ». Le procès d’Amiens la condamne à 5 ans de réclusion (22 mars 1905) ; celui de Laon confirme les 5 années en prison. Rose Roux est donc libérable en 1908 si l’on tient compte du temps passé en préventive.  « Rose Roux eu moins de chance. Ses cinq ans de réclusion furent confirmés. Quand elle sortira de prison, en 1908, ce sera une femme prématurément vieillie. Alexandre lui écrira de temps à autres et puis … » ; « Quand les portes de la prison s’ouvrent enfin devant lui [Jacob] le 30 décembre 1928, (…) Rose est morte depuis 5 ans ». (Les Vies d’Alexandre Jacob, p.251 et p.337). Bernard Thomas ne commet que deux bourdes en écrivant ces quelques lignes sur le devenir de la maîtresse de Jacob. Mais elles sont de taille !

Rose Roux 1903Le calcul du journaliste au Canard Enchaîné parait juste quant à la libération de Rose Roux.  Mais, un peu plus loin dans son roman biographique, il la fait mourir en 1923, soit 5 ans avant la libération d’Alexandre Jacob (qui en outre n’est pas libéré en 1928 mais en 1927). Tout d’abord, le forçat Jacob n’a le droit d’écrire qu’à une seule personne et, désormais, toute communication avec l’extérieur de son univers carcéral passe soit par l’administration pénitentiaire, soit par sa mère. Alexandre Jacob n’a donc pu laisser tomber une correspondance qui n’a jamais existé.

Rose Roux est morte en 1907, un an avant sa libération. A cette époque, le forçat Jacob, matricule 34777, se trouve sur les îles du Salut. Les époux Develay, résidant à Montreuil puis à Vincennes à partir de septembre 1905, se sont occupés des affaires de Marie Jacob avant et après sa libération. Régulièrement, ils lui envoient des mandats l’avertissant de telles ou telles transactions et donnent de temps à autre de leurs nouvelles. Le mandat de 10 francs envoyé le 19 janvier 1907 à Marie Jacob est à ce propos des plus instructifs : « Chère amie je vou envoie 10F ses tou que pui pour le momen mai je vou enverrai regulierement tou les 15 jour nou avon appri  avec peine la mort de Rose cela nous a bien ennuiez bien des choses à votre fils ». Nous avons respecté l’orthographe du document. Alexandre Jacob n’a donc pu laisser tomber une très hypothétique correspondance après la libération de sa concubine si celle-ci est morte en prison. Le décès est d’ailleurs confirmé par une autre source : Marie Jacob. Si le forçat 34777 ne peut écrire qu’à une seule personne, il n’est pas interdit en revanche à sa mère, libre, de la faire à qui elle veut. Le 4 avril et le 5 mai 1907, le bagnard matriculé 34198 (c’est à dire Félix Bour) reçoit deux missives signées « ta mère » pour l’une et « ta grand-mère Berthou » pour la seconde. Berthou est le nom de jeune fille de Marie Jacob.

Rose Roux 19054 avril : « Cher Félix, (…) la mort de la pauvre Rose m’avait brisée. (…) Je te recommande la discrétion la plus absolue à propos de la mort de Rose car il serait trop malheureux »

5 mai : « Je te recommande de nouveau de ne pas parler de la mort de Rose car il l’apprendra toujours trop tôt. Je lui fais savoir petit à petit car je sais qu’il en sera fort chagrin »

La mort de Rose sonne ainsi comme l’épilogue de l’aventure illégaliste des Travailleurs de la Nuit. La question du devenir des compagnons de Jacob se pose alors. Beaucoup refont leur vie mais tous ceux qui furent condamnés au bagne n’en reviennent pas … sauf le matricule 34777. En octobre 1925, l’ancien bagnard est interné à la prison de Saint Nazaire.

 Sources :

         Fonds Jacob, CIRA Marseille

         Archives Nationales, BB18 2261A, dossier 2069A 03

         Archives Nationales, BB24 1012, dossier 2818 S 05

         Archives de l’Outre-Mer, H4086/34198   (Félix Bour)

 

 

 

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