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Chine fin de siècle
Midi Libre, 2 mars 1995

Sombre fin de siècle

Le Montpelliérain Jean-Jacques Gandini vient de publier [1] un recueil d’articles qu’il a signés depuis une dizaine d’années, sur la Chine en général ; la plupart au regard d’un point de vue anarchiste dans ce contexte, en particulier. Le festival du film chinois l’invite à animer une conférence-débat sur le thème « La croissance sans les droits de l’homme ? » [2]

Midi Libre : Une approche des problèmes chinois au regard. de la pensée anarchiste, ça a une valeur d’actualité, ou seulement historique ?
Jean-Jacques Gandini :
L’explosion du mouvement démocratique s’est accompagnée d’une réactivation de la réflexion sur l’histoire, avec une grande curiosité. Les jeunes dissidents ne découvrent pas que l’anarchisme, mais ils le découvrent aussi : Il n’est pas mince de considérer qu’un courant anarchiste influent a existé, aux sources du mouvement révolutionnaire chinois. Aujourd’hui, si on lit les textes de Wei ’in Shing, le principal leader de la contestation en Chine, on retrouve beaucoup d’éléments proches de l’idéal d’un communisme ouvert, libertaire.

M-L : Vous attendez quelque chose de la disparition de Deng Xiao Ping ?
J-J. G. :
La disparition des grands dirigeants a souvent provoqué des bouleversements. D’autant que Deng n’est pas n’importe quel dirigeant, il est le dernier à pouvoir se prévaloir, de la légitimité révolutionnaire. Ce n’est pas le cas des prétendants dorénavant.
Or le risque d’explosion sociale est important. La corruption est à son comble, et tandis que les membres du parti communiste sont devenus des hommes d’affaire qui s’enrichissent, des secteurs gigantesques de la population, qui ont des revenus fixes, sont laminés par l’explosion capitaliste, l’inflation, etc. J’ai rencontré un ancien étudiant brillant de Montpellier : universitaire, il gagne en un mois ce qu’un commerçant gagne en un jour. Des provinces entières ne suivent plus, tandis que celles qui décollent, sur la
côte, sont tentées de jouer seules, à leur propre profit.

M-L : « Tout changer pour ne rien changer » est le sous-titre de votre livre. Pessimisme ?
J-J. G. : Il y a apparence de changement, mais le Parti Communiste reste seul maître à bord. Inquiet de la suite, il se crispe. Les condamnations sont de plus en plus fortes, à l’encontre d’opposants qui ne remettent même pas en cause son rôle dominant, mais ne réclament que la possibilité pour d’autres courants d’exister. Certains ont cru que l’évolution économique galopante se traduirait automatiquement par des améliorations politiques peu à peu. Pour L’instant cela ne se vérifie pas.
Mais attention, lorsque les Chinois se révoltent, ils y vont jusqu’au bout. Il ne faut pas se tromper sur ce qui s’était passé au moment de Tien An Men : il ne s’agissait pas des seuls étudiants et intellectuels, mais bien de toutes les couches de la population.


NOTES :

[1« Chine fin de siècle - Tout changer pour ne rien changer ». Atelier de création libertaire. 70 F.

[2« La croissance sans les droits de l’homme ? ». Avec Marie Holzman et Jean-Jacques Gandini. Vendredi 3 mars à 18 h, salle Rabelais.