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Is marmite beautiful ?

[1]Propagande par le fait. Le débat pourrait se lancer à la suite de l’article narratif de Patrick Schindler, paru dans les colonnes du Monde Libertaire au mois de mars de cette année. L’historiographie des poseurs de bombes anarchistes porte en elle la question forcément déformante de l’approbation ou plutôt de la condamnation quasi-systématique du recours à la violence politique. Le champ lexical de l’étude du terrorisme pratiqué, en son temps, par les sectateurs de la marmite à renversement utilise le plus souvent le vocabulaire médical. Parler d’épidémie d’attentats, évoquer le dérangement psychiatrique ou bien la maladie infantile de l’anarchisme conduit inévitablement à occulter ou à nier de réelles et profondes motivations dans un contexte particulier.

Pour autant, et c’est ce que souligne Marianne Enckell dans sa réponse publiée deux semaines plus tard dans le même hebdomadaire, cette histoire n’appartient pas aux seuls anarchistes. De la sorte, l’animatrice du CIRA souligne l’apport inestimable mais critiquable des travaux réalisés par nombre d’historiens non libertaires. Porter son regard sur un phénomène qui dépasse largement le cadre hexagonal et s’inscrit dans la durée suppose en fin de compte l’abandon des aprioris passionnels et des confusions, volontaires ou non, sur la notion sémantique d’action directe.

La démarche classique avec son objet, son corpus de recherche et l’établissement d’une problématique raisonnée permet pourtant d’éviter tout désir comparatif avec l’actualité. De la sorte, la question de l’anarchisme d’un Ravachol, d’un Vaillant ou de bien d’autres encore suggère une évidente réponse : parfaitement ! Le reste n’est qu’histoire … blabla. C’est selon.

[2]Le Monde Libertaire

N°1624

Semaine du 24 février au 02 mars 2011

« Si les anarchistes n’écrivent pas leur histoire, ce sont les autres qui l’écriront à leur place » Inconnu

La propagande par le fait : ta meilleure amie, prolétaire, c’est la chimie !

La répression subie par les communards après la défaite de la Semaine sanglante amène un durcissement des positions des anarchistes en France. C’est Bakounine qui, le premier, en 1876, peu avant sa mort, abandonne ses écrits et affirme « qu’il est temps maintenant d’agir ». Une position qui sera d’ailleurs reprochée plus tard au mouvement libertaire. À la même époque, durant le congrès international de Berne, Malatesta lance à son tour l’idée d’une « guerre continuelle aux institutions établies », c’est la naissance de la « propagande par le fait ». L’idée n’a plus qu’à faire son chemin…
Premiers pas de la propagande par le fait en Europe
Dans un premier temps, la propagande par le fait se manifeste par une série de faits insurrectionnels, puis d’attentats ciblés. Le premier a lieu en Italie le 5 avril 1877. Cafiero et Malatesta conduisent une trentaine de militants armés qui brûlent les archives communales d’un petit village de montagne de la province de Bénévent et distribuent aux pauvres le contenu de la caisse du percepteur. Leur but est d’appliquer les rudiments d’un communisme libertaire. Malheureusement, les paysans ne les suivent pas dans leur entreprise révolutionnaire et ils sont finalement capturés après une fusillade. Mais, ces premiers pas de « l’action par le fait » contre la propriété privée ou les pouvoirs publics feront des petits en introduisant l’idée des « attentats individuels ». Et, pendant un demi-siècle, la bourgeoisie européenne sera hantée par l’image « du nihiliste et de l’anarchiste poseurs de bombe ».
Début 1878, Vera Zasulich prend le relais en Russie et tente d’assassiner le général Theodore Trepov, responsable de la torture des prisonniers narodniks. Elle sera finalement acquittée. En juin de la même année, c’est au tour de l’empereur Guillaume Ier d’être victime de deux tentatives d’assassinat organisées par les anarchistes Max Hödel et Karl Eduard Nobiling. Ces tentatives se solderont par une répression, organisée par Bismarck, contre les sociaux-démocrates allemands et entraîneront la promulgation des « lois antisocialistes » du Reichstag.
En octobre 1878, Juan Oliva Moncasi tente d’assassiner le roi Alphonse XII d’Espagne. Le 17 novembre 1878, c’est au tour de Giovanni Passanante de tenter d’assassiner le roi Humbert Ier d’Italie.
De la propagande par le fait aux attentats individuels
C’est durant le congrès international anarchiste de Londres en 1881, qu’en présence de Louise Michel et d’Émile Pouget, cette nouvelle stratégie de propagande par le fait est proclamée. Son objectif est de « se trouver sur le terrain de l’illégalité, avec des moyens en adéquation avec le but révolutionnaire du communisme libertaire ».
Dans cette logique, le 1er mars 1881, l’empereur Alexandre II de Russie est assassiné par la narodnaya Volya. Le geste est salué par la presse anarchiste, notamment dans Le Révolté et La Révolution sociale.
Outre-Atlantique, à Chicago, le 4 mai 1886, une manifestation ouvrière au Haymarket Square vire à la tragédie. Un inconnu lance une bombe sur les policiers, un officier est tué sur le coup. Ses collègues ouvrent immédiatement le feu sur la foule. En face, les manifestants répliquent. Sept policiers trouvent la mort ainsi qu’une trentaine de manifestants. Après l’attentat, la répression s’abat sur les milieux anarchistes très actifs de Chicago. Huit hommes sont arrêtés et accusés de l’attentat de Haymarket. Malgré l’absence de preuves, cinq sont condamnés à mort. August Spies, Albert Parsons, George Engel et Adolph Fischer sont pendus, et Louis Lingg se suicide dans sa cellule.
« Mes mains sont couvertes de sang, comme votre robe rouge » (Henry)
En France, un premier attentat attribué aux anarchistes est initié puis supervisé par Louis Andrieux, préfet de police. Son but est de mettre la main sur un « nid de dynamiteurs » en facilitant leur arrestation. La cible retenue est la statue d’Adolphe Thiers, le « boucher de la Commune », à Saint-Germain-en-Laye.
L’attentat a lieu dans la nuit du 15 au 16 juin 1881 mais ne fait aucun dégât. On apprendra plus tard la supercherie. De 1881 à 1884, plusieurs personnages publics sont visés dont, entre autres, Gambetta et Jules Ferry. La propagande par le fait se transforme alors en attentats individuels. Le premier a lieu le 8 novembre 1892. Ce jour-là, Émile Henry, anarchiste âgé de 19 ans, dépose une bombe dite « à renversement » dans les bureaux de la compagnie des mines de Carmaux. Découverte par le concierge du bâtiment, ce dernier l’apporte au commissariat de police de la rue des Bons-Enfants, mais elle y explose, tuant cinq personnes, la sixième victime succombera à une crise cardiaque. Pour expliquer ce geste et l’engagement d’Émile Henry, il faut rappeler que son père, Sixte-Casse Henry, s’était battu dans les rangs des communards.
Fin 1892, Émile Henry loue un appartement villa Faucheur dans le XXe arrondissement de Paris sous le nom d’emprunt de Louis Dubois, pour y préparer ses attentats. Le 12 février 1894, à 9 heures du soir, il pénètre dans le café Terminus, gare Saint-Lazare. S’étant assis à un guéridon libre, Émile Henry tire d’une poche de son paletot une petite marmite de fer blanc bourrée d’explosifs et l’envoie en l’air. Elle se heurte à un lustre, éclate et pulvérise toutes les glaces ainsi que quelques tables de marbre, faisant, au total, une vingtaine de blessés (dont un succombera à ses blessures). Henry s’enfuit, poursuivi par un agent de police, un garçon de café et un cheminot sur lequel il tire. Il le manque, blesse un agent et finit par se faire prendre.
Le 27 avril 1894, Henry comparaît devant la cour d’assises de la Seine et est condamné à mort. L’audience est marquée par ses répliques désormais devenues célèbres : « Je suis anarchiste depuis peu de temps. Ce n’est guère que vers le milieu de l’année 1891 que je me suis lancé dans le mouvement révolutionnaire. Auparavant, j’avais vécu dans les milieux entièrement imbus de la morale actuelle. J’avais été habitué à respecter et même à aimer les principes de Patrie, de Famille, d’Autorité et de Propriété. Mais les éducateurs de la génération actuelle oublient trop fréquemment une chose, c’est que la vie, avec ses luttes et ses déboires, avec ses injustices et ses iniquités, se charge bien, indiscrète, de dessiller les yeux des ignorants et de les ouvrir à la réalité. C’est ce qui m’arriva, comme il arrive à tous. »
« Je ne tardais pas à comprendre que les grands mots qu’on m’avait appris à vénérer : Honneur, Dévouement, Devoir n’étaient qu’un masque voilant les plus honteuses turpitudes. L’usinier qui édifiait une fortune colossale sur le travail de ses ouvriers, qui, eux, manquaient de tout, était un monsieur honnête. Le député, le ministre, dont les mains étaient toujours ouvertes aux pots-de-vin, étaient dévoués au bien public. L’officier qui expérimentait le fusil nouveau modèle sur des enfants de sept ans avait bien fait son devoir, et, en plein parlement, le président du Conseil lui adressait ses félicitations. »
« Dans cette guerre sans pitié que nous avons déclarée à la bourgeoisie, nous ne demandons aucune pitié. Nous donnons la mort et nous devons la subir. C’est pourquoi j’attends votre verdict avec indifférence. Je sais que ma tête ne sera pas la dernière que vous couperez. Vous ajouterez d’autres noms à la liste sanglante de nos morts. Pendus à Chicago, décapités en Allemagne, garrottés à Xérès, fusillés à Barcelone, guillotinés à Montbrison et à Paris, nos morts sont nombreux ; mais vous n’avez pas pu détruire l’Anarchie. Ses racines sont profondes : elle est née au sein d’une société pourrie qui s’affaisse ; elle est une réaction violente contre l’ordre établi ; elle représente les aspirations d’égalité et de liberté qui viennent battre en brèche l’autoritarisme actuel. Elle est partout. C’est ce qui la rend indomptable, et elle finira par vous vaincre et par vous tuer. » Émile Henry fut guillotiné le 21 mai 1894 à l’âge de 21 ans. La foule salua le fourgon qui transportait son corps.
L’attentat de Vaillant
Né dans les Ardennes en 1861, Auguste Vaillant connaît une enfance misérable. À 12 ans, il vit seul à Paris et est condamné plusieurs fois pour avoir pris le train sans billet ou pour avoir mangé dans un restaurant et être parti sans payer. Il est séduit par les milieux anarchistes et commence à fréquenter certains de ses groupes. Il se marie et vit dans le dénuement avec sa femme et leur fille Sidonie, qui sera recueillie plus tard par Sébastien Faure. Après trois ans d’exil en Argentine où il décide de tenter sa chance, il revient en France et renoue alors avec le milieu des « compagnons » anarchistes, de ceux qui préconisent la propagande par le fait. C’est à cette époque que Vaillant décide de venger la mort de Ravachol et de dénoncer la répression du gouvernement de Jean Casimir-Perier contre les activistes anarchistes.
C’est le 9 décembre 1893 vers 16 heures qu’il passe à l’acte. Il lance une bombe d’une grande puissance dans l’hémicycle de la Chambre des députés au Palais-Bourbon, bombe chargée de clous, de morceaux de zinc et de plomb qui s’abat sur les députés et sur les spectateurs assistant aux délibérations. On compte une cinquantaine de blessées, dont Vaillant lui-même. Arrêté avec vingt autres personnes, il avoue dans la nuit qu’il est l’auteur de l’attentat. Lors de son procès, il fait remarquer que son geste était destiné à blesser et non à tuer, raison pour laquelle il avait rempli sa bombe avec des clous et non avec des balles. Avant le verdict, Vaillant s’exprime devant les jurés : « Messieurs, dans quelques minutes vous allez me frapper, mais en recevant votre verdict, j’aurai la satisfaction d’avoir blessé la société actuelle, cette société maudite où l’on peut voir un homme dépenser inutilement de quoi nourrir des milliers de familles, société infâme qui permet à quelques individus d’accaparer la richesse sociale. Las de mener cette vie de souffrance et de lâcheté, j’ai porté cette bombe chez ceux qui sont les premiers responsables des souffrances sociales. »
Auguste Vaillant est condamné à mort, Sadi Carnot refuse d’accorder sa grâce et il est guillotiné le 5 février 1894, à l’âge de 33 ans. Avant l’instant fatal, il crie : « Vive l’anarchie, ma mort sera vengée. » Vaillant est la seule personne à avoir été guillotinée sans avoir commis de crime de sang (hormis pendant la Révolution française). Sa mort entraîne la colère des anarchistes.
« Courage, les amis ! Vive l’anarchie ! » (Caserio)
Depuis qu’il a refusé la grâce à Auguste Vaillant, Sadi Carnot est particulièrement haï par les militants anarchistes. Le 24 juin 1894, Sante Geronimo Caserio, anarchiste italien, poignarde mortellement le président Carnot pendant une cérémonie publique à Lyon en le frappant au cœur à l’aide d’un couteau au manche rouge et noir (les couleurs de l’anarchie). Il n’essaye pas de fuir, mais court autour de la voiture du président en criant « Vive l’anarchie ». Il passe devant la cour d’assises les 2 et 3 août de la même année. Devant le tribunal qui le condamne à mort, il déclare : « Eh bien, si les gouvernements emploient contre nous les fusils, les chaînes, les prisons, est-ce que nous devons, nous les anarchistes, qui défendons notre vie, rester enfermés chez nous ? Non. Au contraire, nous répondons aux gouvernements avec la dynamite, la bombe, le stylet, le poignard. En un mot, nous devons faire notre possible pour détruire la bourgeoisie et les gouvernements. Vous qui êtes les représentants de la société bourgeoise, si vous voulez ma tête, prenez-la. »
Durant son procès, il ne demande pas la pitié du jury. En cellule, pendant qu’il attend l’exécution, il renvoie le curé venu pour le confesser et sur l’échafaud, avant de mourir, il crie une dernière fois : « Courage, les amis ! Vive l’anarchie ! »
Les lois scélérates
Après la condamnation de Sante Caserio, un anarchiste fut arrêté pour avoir crié sa sympathie envers Caserio dans un local public et un détenu fut violemment frappé pour le même motif. L’assassinat de Sadi Carnot entraîne le vote par l’Assemblée de la troisième des lois dites « scélérates » dont le but est de compléter l’arsenal répressif contre les menées anarchistes.
Pour rappel, la première de cette série de lois est votée le 12 décembre 1893. Elle concerne la sécurité générale et crée de nouveaux délits, dont l’apologie de faits ou apologie de crimes. Cette loi permet aux autorités d’ordonner des arrestations et des saisies préventives. La seconde, datée du 18 décembre 1893, concerne les associations de malfaiteurs. Elle a pour objectif d’autoriser toute poursuite contre des groupes accusés de préparer des attentats. Enfin, la troisième, adoptée le 28 juillet 1894, concerne la liberté de la presse. Elle interdit toute propagande anarchiste et se traduit, notamment, par l’interdiction de tous les journaux libertaires. Ces lois scélérates ne seront abrogées que… le 23 décembre 1992 !

Patrick Schindler

Pour en savoir plus sur Émile Henry :
Walter Badier, Émile Henry, de la propagande par le fait au terrorisme anarchiste, éditions libertaires, 226 pages, 15 euros. Disponible à la Librairie du Monde libertaire, 145, rue Amelot, 75011 Paris.

[3]Le Monde Libertaire

N°1626

Semaine du 10 au 16 mars 2011

Une histoire collective

Pas sûre que l’épigraphe de la rubrique soit judicieuse. Jean Maitron en France, Pier Carlo Masini en Italie, Paul Avrich pour la Russie et les États-Unis ont été les défricheurs d’une histoire mal connue avant leurs travaux, et ont fait preuve d’une belle empathie et d’une grande amitié pour les personnes et le mouvement qu’ils étudiaient (Masini n’était plus anarchiste quand il est devenu historien). Parmi « les autres » qui écrivent l’histoire des anarchistes, il y a certes des adversaires, et notamment ceux qui résument la notion de « propagande par le fait » aux attentats des années 1892-1894 en France.
Quand le congrès international de Londres, en 1881 1, décide après de longues discussions qu’il faut « porter notre action sur le terrain de l’illégalité, qui est la seule voie menant à la révolution », il ne dit pas que la chimie ou le poignard soient les seuls ou les meilleurs moyens à utiliser ; c’est malheureusement ce que laisse entendre l’article de Patrick Schindler (Monde libertaire n° 1624, 24 février 2011).
L’article commence bien, avec Bakounine et Malatesta. Qui parlent d’action (on dira plus tard action directe), de grève, de révolution en permanence (Malatesta à Berne en 1876), d’insurrection, et qui mettent leurs idées en pratique. C’est tout cela, la propagande par le fait, pas seulement la dérive vers l’attentat individuel 2. Et les anarchistes ont une vieille expérience, qui a pris des formes cohérentes et toujours réinventées : blocages, sabotages, réappropriations, occupations, grèves expropriatrices, récup ou cuisines communistes…
Je ne suis pas sûre qu’Henry, Vaillant ou Caserio aient nommé « propagande par le fait » leurs actes. « Nous donnons la mort et nous devons la subir », dit Henry ; « Si vous voulez ma tête, prenez-la », déclare Caserio ; et Vaillant se dit « las de mener cette vie de souffrance et de lâcheté ». Solidaires avec ceux qui ont été réprimés et assassinés avant eux, ils ne voient que la mort comme issue exemplaire.
À Londres, les anarchistes avaient bien vanté la chimie, mais ils avaient aussi parlé de l’importance d’agir parmi les paysans et les masses populaires en général, de développer la presse clandestine et la solidarité. Tout cela sous le beau nom de propagande par le fait.
Écrivons notre histoire, que nous soyons historiens certifiés ou non ; mais écoutons les voix de nos prédécesseurs. Ils n’ont pas fait l’histoire individuellement : ne restons pas isolés pour l’écrire, mettons nos connaissances en commun, pour retrouver les sources et sortir de la légende. Nous sommes quelques-uns à nous y exercer pour les biographies du Dictionnaire Maitron des anarchistes, la mise à jour de la thèse de René Bianco sur la presse de langue française ou d’autres projets. Venez nous rejoindre.

Marianne Enckell
1. Auquel Émile Pouget n’assistait pas : finissons-en une bonne fois avec cette légende, qui ne repose que sur un rapport de police rédigé plusieurs années plus tard.
2. Eduardo Colombo démonte cette dérive dans « Le sens de l’action directe », Réfractions n° 25, automne 2010.

Réponse à Marianne Enckell
Tu as raison de souligner que nous ne pouvons faire fi du travail formidable réalisé par des historiens non anarchistes sur l’histoire du mouvement libertaire. Et notre épigraphe consistait moins à se désolidariser du travail d’autrui qu’à encourager les militants anarchistes à se saisir de leur plume pour s’approprier et écrire, à leur tour, l’histoire de leur mouvement. Car des historiens de l’anarchisme comme Jean Maitron ou même Jean Préposiet terminent généralement leurs écrits par des conclusions – idéologiques – pessimistes qui limitent le rôle des anarchistes à celui de contre-pouvoir ou de « mauvaise conscience du pouvoir ». En ce sens, les militants anarchistes pourraient apporter d’autres vues, plus favorables à la mise en valeur de la pertinence, de la viabilité et de la possible mise en œuvre du projet de société porté par les anarchistes d’hier et d’aujourd’hui.
Le Comité de rédaction du Monde libertaire