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Notre environnement synthétique
La décroissance n° 146 de février 2018
Nous n’avions pas encore trouvé le temps de recenser Notre Environnement synthétique, livre de l’éco-anarchiste Murray Bookchin (1921-2006) sorti il y a quelques mois déjà et traduit par notre chroniqueur Denis Bayon. Toutes nos excuses. Dans sa préface, celui-ci le présente comme un texte « fondamental pour l’écologie politique ». Publié en 1962 aux États-Unis et éclipsé par le retentissant Printemps silencieux de Rachel Carson paru la même année, Notre Environnement synthétique dresse un tableau précis de la transformation de l’environnement en cours et de la dégradation de la santé humaine. Le constat de Murray Bookchin est clair : la vie moderne est pathogène. De plus en plus passifs, mal nourris par une agriculture industrielle qui détruit les sols et la diversité, les habitants stressés des mégapoles sont exposés à la pollution de l’air, de l’eau, aux pesticides, au danger de la radioactivité. Ils développent des cancers, du diabète, des maladies cardiovasculaires, respiratoires, et autres maux liés à une profonde détérioration de leur milieu et de leur mode d’existence. « En simplifiant à l’excès l’environnement naturel, nous avons créé un homme incomplet qui mène une vie déséquilibrée dans un monde standardisé, écrit Bookchin. Un tel homme est malade, non seulement moralement et psychologiquement, mais aussi physiquement. » Et alors que la société s’atomise, que les individus sont isolés comme jamais et que « les pratiques de coopération, d’entraide, de simple hospitalité et de décence se sont réduites de manière alarmante », « l’aliénation humaine est presque absolue ». Le penseur libertaire appelle donc à veiller aux équilibres biologiques et à remettre en cause les lois du commerce et de l’industrie qui conduisent à la surexploitation de la nature. Il plaide pour une société régionaliste, à échelle humaine, qui permettrait un meilleur rapport entre villes et campagnes et remédierait à l’extrême division du travail. Là où il se montre moins lucide, c’est sur la confiance qu’il met dans les nouvelles machines pour permettre une telle décentralisation : « Nous sommes en train de préparer les conditions matérielles pour un nouveau type de collectivité humaine »... Hélas, 55 ans après, l’innovation scientifique et technique n’a fait qu’engendrer un environnement toujours plus synthétique.
P. T.
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