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Abolir la dette
Ballast - revue en ligne - Cartouche 50
L’économiste et sociologue communiste Bernard Friot est connu pour avoir élaboré cette proposition que Frédéric Lordon tient pour « proprement révolutionnaire » : le salaire à la qualification personnelle, plus couramment désigné sous la formulation « salaire à vie ». Qu’est-ce à dire ? Il s’agit de reconnaître tout un chacun comme producteur de valeur économique et d’abolir le marché de l’emploi, grâce, notamment, à l’instauration d’une échelle des salaires pouvant aller de un à quatre. Ce petit livre, construit autour de 49 paragraphes illustrés, se concentre sur la question du crédit en tant qu’institution, « clef de voûte de la domination économique et sociale présente ». À rebours d’une théorie critique qu’il estime trop souvent déplorative et catastrophiste, Friot creuse son sillon en suivant celui que les générations précédentes ont à ses yeux entamé : la Sécurité sociale et le salariat entendu comme conquête de la classe révolutionnaire. Sur fond de péril écologique, l’agriculture fait ici office de fil rouge : la mise en place d’une Sécurité sociale de l’alimentation, entièrement paysanne et biologique, est ainsi décrite, budgets à l’appui. Elle s’instituerait face aux enseignes et circuits capitalistes, qu’il conviendrait d’assécher avec le concours des consommateurs, dotés d’un bon d’achat mensuel de 100 euros à utiliser au sein des réseaux alimentaires pris en charge par cette nouvelle institution. La dette agricole irait reculant, jusqu’à disparaître. Et Friot d’avancer qu’il est possible d’imaginer la généralisation d’un tel régime collectivement contrôlé à l’ensemble des secteurs de production : la « civilisation » capitaliste s’effondrerait, et avec elle le productivisme industriel. Pareil processus « sera long », assure Friot, mais il permettrait de stopper « immédiatement » la progression du désastre écologique en cours.
[L.M.]
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